Cette fiche aborde la question du genre en agriculture, sous l'angle de l'effectif, du rôle joué au sein de l’exploitation, etc. Un focus sur les chef.fe.s d’exploitation et leurs caractéristiques (sexe, âge, niveau de formation, etc.) est également présenté.
Les femmes représentent 29 % de la main-d’œuvre régulière et ont principalement un rôle de conjointe au sein des exploitations agricoles wallonnes. Les hommes quant à eux occupent majoritairement le rôle de chef d’exploitation et sont à la tête de 84 % des exploitations. Lorsque les femmes sont cheffes d’exploitations, elles le sont majoritairement au niveau d'exploitations spécialisées en grandes cultures ou en bovins viandeux, et de plus petites dimensions. Elles sont généralement plus âgées et moins formées que leurs homologues masculins.
Si l’exploitant est une personne morale, toute la main-d’œuvre agricole de l’exploitation est considérée comme de la main-d’œuvre non familiale. C’est pourquoi cette fiche traitera exclusivement des exploitations en personne physique, soit 98 % des fermes en 1990 et 87 % en 2020.
Malgré un recul au cours du temps, les femmes sont bien présentes dans le paysage agricole wallon
Si le secteur agricole wallon reste majoritairement masculin, les femmes ont depuis toujours participé activement au travail sur l’exploitation. Cependant, l’absence de statut spécifique a longtemps empêché la reconnaissance de leur travail, assimilé aux tâches quotidiennes liées à la gestion du ménage.
En 2020, les femmes représentent 29 % de la main-d’œuvre régulière agricole en Wallonie, soit 5 464 femmes. En trente ans, elles ont perdu deux tiers de leur effectif, tout en conservant une place relativement identique au sein de la main d’œuvre totale. Elles étaient 15 558, début des années ‘90,soit 34 % de la main-d’œuvre régulière.
Les hommes, quant à eux, sont deux fois plus nombreux (13 623 hommes). En trente ans, la perte de leur effectif a également été important (55 %) mais moins que pour les femmes. En 1990, les hommes étaient au nombre de 30 518.
- L’OTE n’influence pas la répartition de la main-d’œuvre selon le genre
Il est important de souligner que l’analyse des facteurs sur base des orientations technico-économiques [OTE] n’est effectuée que pour les exploitations professionnelles. En 2020, cela représente 84 % de la main-d’œuvre régulière.
En 2020, quelle que soit l’OTE, la répartition de la main d’œuvre selon le genre est similaire à celle observée dans la population agricole totale (30 % - 70 %). Il n’y pas d’influence significative de l’OTE sur cette répartition.
Cependant, l’évolution du nombre de travailleurs au sein des différentes OTE diffère selon le genre. Depuis 1990, la perte de main d'oeuvre la plus importante est observée au sein des exploitations spécialisées en bovins laitiers, avec une diminution de 79 % des femmes, contre 72 % pour les hommes. Le constat est encore plus marqué pour les exploitations combinant les cultures et les bovins avec une perte de 78 % de l’effectif féminin mais 67 % pour leurs homologues masculins. A l’inverse, les exploitations spécialisées en bovins viandeux voient leur effectif masculin augmenter particulièrement (+ 48 %). Avec une augmentation de 13 %, l’effectif féminin croît également mais dans une moindre mesure.
- La répartition de la main-d’œuvre sur le territoire n’est pas liée au genre
La répartition des personnes actives en agriculture entre les différentes régions agricoles, bien qu'en parfaite corrélation avec leur nombre d’exploitations, n’est pas spécifique au genre. Quelle que soit la région agricole, les femmes représentent plus ou moins 30 % de la main-d’œuvre régulière totale. Le raisonnement au niveau provincial est identique.
Si la répartition de la main-d’œuvre selon le genre évolue peu au cours du temps en Wallonie, en revanche, la Flandre a connu un léger phénomène de féminisation de la main-d’œuvre régulière, jusqu’en 2013, avec en moyenne 36 % de femmes. En 2020, ce phénomène tend à s’inverser et la répartition entre les hommes et les femmes est de respectivement 69 et 31 %.
Le rôle de la main-d’œuvre en agriculture varie fortement selon le genre
En 2020, une femme sur deux aide son conjoint sur l’exploitation, lui octroyant le statut de "conjoint". Cette proportion représente 10 % de moins qu’en 1990.
Le statut de cheffe d’exploitation concerne trois femmes sur dix. Et par conséquent 16 % des fermes wallonnes sont exploitées par des femmes. Cette proportion a peu évolué depuis 1990 où 17 % des exploitations étaient tenues par des femmes.
L’évolution la plus marquée concerne les autres types de main-d’œuvre : les autres membres de la famille et la main-d’œuvre non familiale. En 2020, quasiment une femme sur six tient un de ces rôles, alors qu’au début des années ’90, cela représentait seulement 6 % des femmes. Cela correspond, à cette époque, à 32 % de l’ensemble de la main-d’œuvre régulière féminine.
Presque 70 % des hommes travaillant en agriculture sont considérés comme "chef d’exploitation". Ce pourcentage a légèrement diminué depuis 1990 où 79 % des hommes avaient ce rôle.
Même si le rôle de conjoint est peu fréquent chez les hommes (5 %), il tend à se masculiniser légèrement au cours du temps. Les hommes représentaient un conjoint sur dix en 1990 et, en trente ans, cette proportion a doublé.
- Le temps de travail varie selon le genre et le rôle que les personnes exercent sur l’exploitation
En 2020, 33 % des femmes travaillent à temps plein sur l’exploitation. Mais cette proportion est variable en fonction du rôle qu’elles ont au sein de l’exploitation. En effet, le régime de travail « temps plein » est légèrement plus fréquent dans le cas des cheffes d’exploitation et des conjointes (respectivement 40 et 31 %). En revanche, pour le reste de la main-d’œuvre dite familiale, le temps de travail partiel prédomine (75 %).
Le régime à temps plein était beaucoup plus fréquent en 1990, et occupait 60 % des femmes actives en agriculture. La diminution de ce régime de travail est particulièrement marquée pour les cheffes d’exploitation (- 24 %) par rapport aux conjointes (- 15 %). A l’heure actuelle, les femmes ont souvent une activité professionnelle en dehors de l’exploitation ce qui peut expliquer en partie cette diminution.
Les hommes sont majoritairement à temps plein (53 %) en 2020. La différence de régime de travail selon le rôle est beaucoup plus marquée chez les hommes. Alors que 62 % des chefs d’exploitation travaillent à temps plein, ce n’est le cas que d’un conjoint sur 5.
Le nombre d’hommes travaillant à temps plein a également diminué (- 18 %) depuis 1990 mais de façon moins importante que pour leurs homologues fémins. Le nombre de chefs d’exploitation à temps plein a diminué de 10 % et à l’inverse, la proportion de conjoints à temps plein est restée stable.
Le profil des chef.fe.s d’exploitation est différent selon le genre
- L'âge moyen, le niveau de formation ainsi que l'âge d'installation diffèrent selon le genre
L’âge moyen des femmes lorsqu’elles sont cheffes d’exploitation est de 57,2 ans, en 2020. Les femmes actives en agriculture sont, en moyenne, plus âgées qu’en 1990 (53,8 ans) soit un vieillissement moyen d’un mois et demi par an.
La moitié des femmes s’installe en agriculture avant 41 ans, avec un léger pic des installations à l’âge de 33 ans. Ce phénomène s’observe 10 ans plus tôt chez leur homologue masculin. Différentes raisons pourraient expliquer ce constat (maternité, première expérience professionnelle hors exploitation, etc.). Plus d’un quart des femmes s’installent après 50 ans, en partie à la suite à l’arrêt d’activité de leur mari.
Seuls 12 % des femmes ont suivi une formation agricole complète et la majorité (74 %) disposent uniquement d’une expérience pratique. Cependant, comme pour les hommes, l’âge influence le niveau de formation des cheffes d’exploitation. 37 % de ces cheffes d’exploitation de moins de 30 ans ont une formation agricole complète.
Quant aux hommes chefs d’exploitation, ils ont en moyenne 54,2 ans en 2020. Ce chiffre a augmenté de 3 ans depuis 1990.
De manière générale, les hommes s’installent plus tôt que les femmes. La moitié des hommes s’est installée avant 30 ans et même 80 % avant 41 ans. Le pic d’installation se situe à 24 ans.
Les hommes ont globalement un niveau de formation plus élevé que les femmes. En moyenne, 22 % d’entre eux disposent d’une formation agricole complète et un homme sur deux a uniquement une expérience pratique. Pour les hommes de moins de 30 ans, ces chiffres s’améliorent : 40 % bénéficient d’une formation agricole complète et 20 % ont uniquement une formation pratique.
- Hormis au sein des exploitations spécialisées en bovins laitiers, la proportion de femmes cheffes d’exploitation tend à augmenter pour toutes les OTE
L’analyse selon l’orientation technico-économique [OTE] ne peut s’effectuer que pour les exploitations professionnelles. En 2016, cela représente 88 % de la main-d’œuvre régulière
Contrairement à la main-d’œuvre totale, on observe des différences entre les genres selon l’OTE.
En 2020, dans les exploitations spécialisées en bovins viandeux ou en grandes cultures, respectivement 16 et 19 % des chefs d’exploitations sont des femmes. Le constat est différent dans les élevages spécialisés en bovins laitiers où seulement 9 % des chefs d’exploitation sont des femmes.
Si on regarde la répartition de l’ensemble des femmes cheffes d’exploitation, on constate que 63 % d’entre elles dirigent une exploitation spécialisée en bovins viandeux et en grandes cultures. Moins de 10 % des cheffes d’exploitations se retrouvent au niveau des élevages spécialisés en bovins laitiers.
En 1990, la proportion de femmes cheffes d’exploitation dans les élevages spécialisés en bovins laitiers était relativement identique à celle d'aujourd’hui. Mais vu le nombre important de ce type d’exploitation dans le paysage wallon au début des années ‘90, cette OTE rassemblait 30 % de l’ensemble des femmes cheffes d’exploitation en Wallonie. A contrario, même si en 1990, les exploitations spécialisées en bovins viandeux et en grandes cultures avaient déjà une proportion plus importante de femmes à leur tête, respectivement 13 et 10 %, ces OTE ne rassemblaient qu’un tiers de l’effectif des cheffes d’exploitation.
Si la proportion de chefs d’exploitation masculins est importante dans les exploitations spécialisées en bovins laitiers et dans celles combinant les cultures et l’élevage de bovins (91 % dans les deux cas), ces deux OTE ne rassemblent que 29 % des chefs d’exploitation. Les exploitations spécialisées en grandes cultures et en bovins viandeux étant plus présentes en Wallonie, ce sont logiquement les deux OTE qui rassemblent le plus de chefs d’exploitation.
Au cours du temps, à l’exception des exploitations spécialisées en bovins laitiers, la proportion d’hommes chefs d’exploitation a diminué, au profit de leurs homologues féminins. En 1990, la majorité des chefs d’exploitations était à la tête d’élevages de bovins laitiers (36 %) ou d’exploitations combinant les cultures et les bovins (24 %).
- La répartition géographique des chef.fes d'exploitations influencée par le genre
En 2020, la proportion de cheffes d’exploitation selon la région agricole varie de 13 à 19 %. C’est la région herbagère qui a la plus faible représentation féminine. Il s’agit également d’une région avec une forte présence d’exploitations spécialisées en bovins laitiers dont la proportion de femmes cheffes d’exploitation est moins importante. A l’inverse, les 19 % de cheffes d’exploitation se rencontrent en région jurassique, région fortement tournée vers l’élevage de bovins viandeux.
La proportion de chefs d’exploitation est plus importante dans la région herbagère (orientée bovins laitiers) et dans les régions limoneuse et sablo-limoneuse (orientées grandes cultures).
- Les cheffes d’exploitation gèrent des fermes plus petites que leurs homologues masculins
En moyenne, en 2020, les femmes cheffes d’exploitation disposent, en moyenne, de 41,5 ha de terres agricoles. Au total, elles gèrent 12 % de la superficie agricole utilisée [SAU] des exploitations, avec une présence renforcée au niveau des terres en agriculture biologique (22 % de la SAU en production biologique).
Elles sont propriétaires de 42 % des terres qu’elles exploitent. Ce pourcentage est légèrement plus élevé que pour les hommes. D’une manière générale, le pourcentage de terres en propriété est d’autant plus faible que la superficie cultivée s’accroît. On pourrait en conclure que les femmes sont plus propriétaires de leurs terres car elles gèrent des exploitations de plus petite dimension. Cependant, on constate que les femmes sont propriétaires d’un part plus importante de leurs terres quelle que soit la dimension de leur exploitation.
En 2020, les hommes disposaient, en moyenne, de 59,5 ha de SAU. Etant donné qu’ils sont plus nombreux et que leurs exploitations sont de plus grande dimension, les chefs d’exploitation exploitent 88 % de la SAU des exploitations. Les chefs d’exploitation sont en moyenne propriétaires de 37 % des terres qu’ils exploitent.
Quelle que soit l’OTE, les hommes chefs d’exploitation gèrent des exploitations de plus grande dimension que les femmes. A titre d’exemple, les chefs d’exploitation en grandes cultures, disposent d’une SAU moyenne majorée de 15,4 ha et, au niveau des exploitations spécialisées en bovins viandeux, d’un cheptel moyen augmenté de 17 vaches allaitantes par rapport à leur homologue féminine.