Cette fiche aborde la rentabilité de l’exploitation en production biologique spécialisée en bovins laitiers, en Wallonie, en détaillant la structure des produits et des charges, sur base des données provenant du réseau comptable de la Direction de l’Analyse économique agricole [DAEA].
En 2022, les produits par unité de superficie agricole utilisée [SAU] augmentent de manière plus importante que les charges. De ce fait, le ratio entre les produits et les charges totales devient supérieur à 1, ce qui signifie que l’exploitation en production biologique spécialisée en bovins laitiers a, en moyenne, des produits en suffisance pour couvrir l’ensemble des charges réelles et calculées. En effet, l’augmentation des produits a plus que compensé l’augmentation des charges.
Plus de 60 % des produits de l’exploitation en production biologique spécialisée en bovins laitiers proviennent des produits du lait
Les produits d’une exploitation contiennent la valorisation des productions et des services agricoles, les recettes des autres activités lucratives, les régularisations et également les aides. La valorisation des productions englobe les ventes mais également la valorisation des stocks (cultures ou animaux) et de l’intra-consommation.
Pour l’année 2022, la somme des produits de l’exploitation en production biologique spécialisée en bovins laitiers atteint une valeur de 89,7 €/100 l de lait, aides comprises. Les produits du lait représentent 63 % du total. Les produits des cultures commerçables représentent seulement 3 %. Le solde provient des autres activités lucratives, des autres activités des herbivores et fourragères, des granivores et bien évidemment des aides (15%).
Depuis 2016, les produits, exprimés par litre de lait, sont en hausse d’environ 30%. L’évolution des produits est naturellement corrélée à celle du prix du lait qui en est la composante principale. En effet, le rendement a augmenté ces dernières années mais plus faiblement que le prix du lait. En 2022, le prix de vente du lait biologique est à un niveau très semblable au prix du lait conventionnel (54,1 €/100 l de lait vs 54,8 €/100 l). De mai à août, les prix sont même plus élevés pour le lait conventionnel que pour le lait biologique, situation très particulière. En effet, le contexte d’inflation alimentaire est potentiellement moins propice à la consommation de produits biologiques. Le prix de valorisation au sein du réseau de comptabilité est un peu plus élevé (56,4 €/100 l) que le prix de vente, une partie du lait est en effet transformée et valorisée à un prix supérieur.
Parmi l’ensemble des produits, les aides, exprimées par litre de lait, présentent une tendance générale à la baisse. Cependant, exprimées par exploitation, ces aides sont à la hausse. La production laitière (dénominateur) augmente alors que le montant des aides reste relativement stable. En 2022, le montant moyen reçu, comprenant les montants des primes du premier et du deuxième pilier, est de l’ordre de 13,5 €/100 l de lait, dont environ un tiers provient des aides biologiques, soit 4,2 €/100 l de lait.
Parallèlement, les « autres produits » provenant, par exemple, des autres activités lucratives telles que la prestation de service pour tiers et l’agritourisme se développent. Dans cette catégorie de produits, sont comprises également, en tant que régularisation des exercices précédents, les indemnités « calamités agricoles », pour les sècheresses 2018 et 2020, et perçues en 2021.
Les charges totales de l’exploitation en production biologique spécialisée en bovins laitiers sont inférieures à ses produits
Au sein des charges d’une exploitation, on peut distinguer les charges opérationnelles affectées directement liées à une activité (semences, engrais, produits phytosanitaires, aliments, frais de cheptel), les charges de structure intégrant les dépenses réelles (fermages, assurances, frais d’entretien, frais généraux, main-d’œuvre salariée, …) et calculées (amortissements comptables, intérêts sur l’actif) ainsi que les charges liées à la rémunération (calculée) de la main-d’œuvre non salariée (familiale) .
En 2022, le total des charges des exploitations en production biologique spécialisées en bovins laitiers s’élève à 85,1 €/ 100 l de lait. La part de chacune de ces grosses catégories de charges est d’environ un tiers.
Alors que les charges étaient stables depuis plusieurs années, l’augmentation du prix de l’énergie amorcée en 2017 change la tendance. Les charges opérationnelles enregistrent la hausse la plus marquée, passant de quelques 19,2 €/100 l de lait en 2016 à 27,7 €/100 l de lait en 2021. Les charges de main d’œuvre ont quant à elles fortement diminué, suite à une diminution de la main d’œuvre familiale par litre de lait. La quantité totale de main d’œuvre est restée relativement stable depuis 2016 (1, 9 UT par exploitation), alors que le rendement ainsi que la quantité de lait produite sur l’exploitation ont augmenté.
- Les charges opérationnelles affectées sont en pleine augmentation
En 2022, les charges opérationnelles affectées de l’exploitation en production biologique spécialisée en bovins laitiers, s’élèvent à 27,1 €/100 l de lait alors que la moyenne des cinq années précédentes est de l’ordre de 22 €/100 l de lait. Par rapport à 2021, les charges sont globalement stables : l’augmentation de la charge en aliment est compensée par une réduction des travaux par tiers ainsi que des frais de cultures.
Pour les cultures, essentiellement fourragères et avec une proportion élevée de prairies, les charges opérationnelles affectées ne sont pas le poste le plus important et représentent 2,2 €/100 l de lait.
L’exploitation en production biologique spécialisée en bovins laitiers fait appel à des tiers pour les travaux agricoles, et ce poste, avec une valeur de plus de 3,8 €/100 l de lait est le deuxième plus important parmi les charges opérationnelles. Ces travaux par tiers sont dans 95% des cas liés aux cultures. Les exploitations spécialisées en bovins ont donc souvent tendance à déléguer certains travaux. Cela répond à un problème de rentabilité de certains matériels à l’échelle d’une exploitation mais également à un besoin de main-d’œuvre extérieure pour la réalisation de certains travaux.
Les charges liées à l’alimentation des bovins représentent près de 50% des charges opérationnelles de l’exploitation, celles de l’ensemble des animaux représentent quant à elles 63%.
Les frais de cheptel reprennent les frais de vétérinaire, les pensions ainsi que des charges diverses.
Evolution des charges opérationnelles affectées de l’exploitation en production biologiques spécialisée en bovins laitiers par unité de 100 litres de lait
Evolution des charges opérationnelles affectées de l’exploitation en production biologiques spécialisée en bovins laitiers par unité de 100 litres de lait
- Parmi les charges de structure, les charges foncières et les charges de matériel font jeu plus ou moins égal
Les charges de matériel représentent 17,1 €/100 l de lait, soit 56 % des charges de structure pour 2022. Avec une valeur de 10,9 €/100 l de lait en 2022, les charges liées au foncier (amortissements, intérêts, entretien, location et assurances des biens fonciers) représentent 35 % des charges de structure de l’exploitation en production biologique spécialisée en bovins laitiers. Exprimées en litre, tant les charges de matériel que foncières sont relativement stables. Par contre, exprimées par hectare, ces charges ont connu une augmentation d’environ 30%.
Les exploitants réalisent une part des travaux avec leur propre matériel et en confient une part à des tiers. Selon les choix de gestion de l’agriculteur et de disponibilité de la main-d’œuvre, cette répartition évolue. Les charges de matériel de l’exploitation doivent donc être mises en relation avec le recours à des tiers pour les travaux agricoles dont on observe une légère hausse. La somme de ces deux types de charges donne une valeur moyenne de l’ordre de 18,6 €/100 l de lait depuis 2016. Les variations annuelles sont notamment liées à la fluctuation du prix de l’énergie qui impacte directement les dépenses en combustibles de l’exploitation, et influence les tarifs de leurs prestataires de service, notamment les entrepreneurs de travaux agricoles. Pour le matériel de l’exploitation, la charge en carburant dépasse les 2€/100 l de lait, soit une augmentation de 60% par rapport à 2021.Cependant, le poids des carburants est relativement faible, limitant l’impact de cette augmentation.
Evolution par 100 litres de lait des charges de mécanisation et travaux par tiers de l’exploitation en production biologiques spécialisée en bovins laitiers
Evolution par 100 litres de lait des charges de mécanisation et travaux par tiers de l’exploitation en production biologiques spécialisée en bovins laitiers
Le volume des produits est suffisant pour couvrir l’ensemble des charges de l’exploitation en production biologique spécialisée en bovins laitiers
Pour comparer le total des produits et des charges de l’exploitation, on peut analyser la valeur des produits par 1 000 € de charges. Si la valeur obtenue est inférieure à 1 000 €, cela signifie que les produits de l’exploitation sont insuffisants pour rémunérer l’ensemble des facteurs de production, y compris de la main-d’œuvre familiale et de l’ensemble du capital (en considérant un fermage sur la totalité de la SAU et un intérêt sur le capital). En 2022, l’exploitation spécialisée en bovins laitiers a engrangé 1 050 € de produits pour 1 000 € de charges. C’est mieux que la moyenne des cinq années précédentes qui indique 916 € de produits par 1 000 € de charges. Cette année, et cela n’a pas été observé depuis lontemps, l’exploitation en production biologique spécialisée en bovins laitiers peut rémunérer l’ensemble de ses facteurs même en considérant que l’ensemble des terres est louée et que l’ensemble de la main d ‘œuvre est salariée.