Cette fiche analyse la culture de froment d’hiver selon une approche territoriale et une approche technico-économique. La première décrit la répartition des superficies de cette culture en région wallonne selon la super-région et selon l'orientation technico-économique [OTE]. La seconde analyse les facteurs influençant la marge brute de cette culture et ce, pour l’ensemble des producteurs, en agriculture conventionnelle, du réseau comptable de la Direction de l’Analyse économique agricole [DAEA] ayant au moins 1 ha de culture de froment d'hiver. Elle présente les différents éléments constituant la marge brute : les produits et les charges opérationnelles affectées à cette culture, sur l’ensemble du territoire, au sein des régions agricoles et de la zone orientée « grandes cultures ».
Le froment d'hiver est la principale céréale cultivée en Wallonie et est présent dans la moitié des exploitations wallonnes, majoritairement celles spécialisées en grandes cultures. L’année 2021 confirme que plus que tout autre élément, le prix de vente du grain influence significativement la marge brute de cette culture. Elle peut être amplifiée ou réduite par les rendements, dépendants entre autres de la région agricole, mais dans une moindre mesure. Enfin, au sein d’une même région et d’une même année, l’écart de marge brute entre les cultivateurs les plus et les moins performants dépasse les 50 % de la marge brute moyenne.
Le froment d'hiver reste la principale culture wallonne en 2021, principalement emblavée au sein d’exploitations spécialisées en grandes cultures
Avec presque 125 000 ha en 2021, le froment d’hiver reste la principale culture agricole en Wallonie. Cette céréale est présente dans un peu moins de la moitié des exploitations wallonnes, sur une superficie moyenne de 20,1 ha.
- 70 % de la superficie de froment d’hiver sont situés dans la zone « grandes cultures »
Pour analyser l’influence des régions agricoles sur les cultures commerçables, on distingue trois « super-régions » que l’on suppose suffisamment homogènes sur le plan des techniques culturales et des résultats. Premièrement, la zone « grandes cultures » regroupant les régions limoneuse et sablo-limoneuse ainsi que la Campine hennuyère. C’est dans ces régions que les cultures commerçables sont les plus fréquentes et que l’on retrouve le plus d’exploitations spécialisées en grandes cultures. Deuxièmement, la zone « herbagère » composée des régions agricoles : région herbagère liégeoise, Fagnes, Famenne, région jurassique, Ardenne et Haute Ardenne. Ces régions sont plus spécialisées en élevage, surtout bovin, et le pourcentage de prairies y est important. Finalement, la zone « Condroz » qui est une région agricole intermédiaire. Cette subdivision de la Wallonie est réalisée pour obtenir un effectif suffisant pour comparer les zones entre elles et pour réaliser des analyses de classe de performance au sein d’une zone donnée (essentiellement la zone « grandes cultures »).
La culture de froment d'hiver se retrouve principalement dans la zone « grandes cultures ». Cette dernière regroupe 70 % des terres qui lui sont dédiées et des cultivateurs, avec une superficie moyenne de 20,2 ha par exploitation, professionnelle ou non. En 2021, presque 80 % des exploitants de cette zone sèment du froment d'hiver.
Avec 23 % de la superficie dédiée à la culture de froment d’hiver, le Condroz arrive en seconde position et se distingue par une plus grande superficie moyenne, s’élevant à 24 ha. Cette région regroupe pratiquement un cinquième de ces cultivateurs.
La zone herbagère comprend peu d’hectares emblavés en froment d'hiver. Moins de 6,5 % de la superficie de cette culture se retrouve dans cette zone et moins d’un huitième des exploitants de cette zone en implante.
- Les exploitations professionnelles spécialisées en grandes cultures et cultivant du froment d’hiver, ont une SAU moyenne dédiée à cette culture de 26 ha
L'analyse des facteurs sur base des orientations technico-économiques [OTE] n’est effectuée que pour les exploitations dites professionnelles, c'est-à-dire dont la production brute standard totale est supérieure à 25 000 euros. Ces dernières couvrent 97 % de la superficie agricole utile [SAU] wallonne.
En 2021, 5 714 exploitations professionnelles cultivent 122 675 ha de froment d’hiver, soit 21,5 ha en moyenne, une superficie légèrement supérieure à la moyenne wallonne. Presque 62 % de la superficie emblavée en froment d'hiver (75 868 ha) se retrouvent au sein d'exploitations professionnelles spécialisées en grandes cultures. Ces exploitations représentent plus de la moitié des producteurs de froment d'hiver et en moyenne, ils y consacrent 26 ha. A contrario, les exploitations spécialisées en bovins gèrent 13,5 % de la superficie totale dédiée à cette culture, pour une SAU moyenne deux fois moindre.
En 2021, le rendement moyen du froment d’hiver plonge sous les 8 000 kg/ha mais il est compensé par un prix de vente du grain en forte hausse qui atteint 260 €/tonne
En 2021, le rendement de la culture de froment d’hiver s’établit à 7 930 kg/ha. Il s’agit de la seconde plus mauvaise valeur juste après le résultat décevant de 2016. Ce rendement est environ 1 000 kg/ha inférieur à la moyenne des dix années précédentes qui est de l’ordre de 8 900 kg/ha. Le printemps et l’été froids et humides ont non seulement pénalisé le rendement mais, ils ont également rendu la moisson difficile et entrainé des pertes de qualité des céréales.
En revanche, le prix de vente du grain de froment a poursuivi la hausse démarrée en 2020. En 2021, on enregistre ainsi un prix de vente moyen de 260 €/tonne, soit la valeur la plus élevée des dix dernières années pour lesquelles la moyenne du prix de valorisation du froment est de 182 €/tonne. De tels prix s’expliquent probablement par des stocks bas avec une récolte au niveau mondial en baisse alors que la consommation augmente légèrement.
- Les agriculteurs les plus performants de la zone « grandes cultures » se distinguent surtout par un prix de vente nettement supérieur
Le rendement observé dans la zone « grandes cultures » est de 8 200 kg/ha de froment d’hiver, bien qu’en retrait par rapport aux années précédentes, il reste nettement supérieur aux 7 300 kg/ha relevés dans le Condroz et dans la zone herbagère. Les agriculteurs de la zone « grandes cultures » obtiennent généralement un prix de vente légèrement supérieur. Ces exploitants, pour qui il s’agit d’une importante source de revenu, utilisent des techniques de commercialisation particulières : attendre le meilleur moment pour vendre leur grain qui est peut-être aussi d’une qualité légèrement supérieure et, pour certains d’entre eux stocker une part de leur récolte.
En 2021, si l’on compare, entre eux, les producteurs de froment d’hiver de la zone « grandes cultures », au niveau de leurs performances dans l’obtention de la marge brute, on observe que les producteurs les plus performants (quartile supérieur) atteignent un rendement d’à peine 8 750 kg/ha mais vendent leurs grains à un prix très intéressant de près de 300 €/tonne. A l’opposé, les moins performants plafonnent avec un rendement de 7 500 kg/ha qu’ils valorisent à 227 €/tonne. Le différentiel de rendement entre les groupes extrêmes, de l’ordre de 1 200 kg/ha, est moins marqué que les années précédentes pour lesquelles on observait généralement des écarts de près de 2 000 kg/ha. Par contre, l’écart de prix de vente de 70 €/tonne est nettement plus marqué.Ceci résulte d'une hausse de prix très importante qui s'est marquée au printemps 2022 et qui a profité à quelques producteurs patients qui ont vendu au bon moment.
En 2021, avec près de 2 070 €/ha, le produit principal pour le froment d’hiver est le plus élevé des 10 dernières années
En 2021, le prix élevé du grain de froment compense largement le mauvais rendement et conduit à un produit principal, issu de sa valorisation, de 2 070 €/ha, soit le meilleur résultat des dix dernières années. Depuis 2012, ce produit principal n’a cessé de diminuer pour atteindre pratiquement 1 000 €/ha en 2016, avant de remonter jusqu’en 2021. A ce produit principal s’ajoute un éventuel produit secondaire provenant de la valorisation de la paille vendue ou intra-consommée. En 2021, ce sous-produit est de 270 €/ha.
- Le différentiel de produit principal, entre la zone « grandes cultures » et les autres zones, est 3 fois moindre que celui observé entre les groupes de performances extrêmes en zone « grandes cultures »
En 2021, en zone « grandes cultures », le produit principal de la culture du froment atteint 2 150 €/ha, soit environ 300 €/ha de plus que dans le Condroz ou la zone herbagère
Si l’on compare les performances des producteurs de froment d’hiver pour la zone « grandes cultures », on relève un important différentiel de produit principal de l’ordre de 890 €/ha entre les groupes extrêmes. De plus, le groupe le plus performant valorise un peu mieux la paille, portant la différence de produit total à près de 990 €/ha.
Les charges opérationnelles affectées sont équivalentes à celles relevées en 2020
En 2021, les charges opérationnelles affectées, hors travaux par tiers, pour la culture de froment s’élèvent à 443 €/ha, alors que la moyenne des dix années précédentes est de l’ordre de 467 €/ha. Les achats de pesticides représentent un peu plus de 44 %, ceux d’engrais 34 %, les semences 19 % et le solde composé des autres charges directes à peine 2 %.
Ces charges opérationnelles affectées ont connu une forte hausse après 2010 et sont passées par un maximum de plus de 500 €/ha en 2013 et 2014, avant de redescendre au niveau actuel à partir de 2017. Les prix des engrais étaient à un niveau relativement bas ces cinq dernières années. La fertilisation azotée pour le froment oscille entre 180 à 190 unités/ha au cours des dix dernières années. Les apports de phosphore et de potassium sont de l’ordre de 4 à 6 unités/ha pour chaque élément nutritif.
A titre informatif, le montant consacré aux travaux par tiers est de 160 €/ha, tout à fait comparable à la moyenne des dix années précédentes de 163 €/ha.
- Les écarts de charges opérationnelles affectées sont peu importants que ce soit entre les groupes de performance ou entre les régions agricoles
En comparant les trois grandes zones agricoles considérées, on n’observe pas de réelles différences au niveau des charges opérationnelles affectées, hors travaux par tiers, qui varient de 442 à 475 €/ha.
De même, les groupes de performance au sein de la zone « grandes cultures » n’enregistrent pas d’écarts significatifs entre leurs montants de charges opérationnelles affectées qui sont compris entre 435 et 468 €/ha.
Avec 1 627 €/ha de marge brute du produit principal du froment, l’année 2021 est en comparaison avec les dix dernières campagnes, de loin la meilleure
En 2021, la marge brute du produit principal de la culture de froment d’hiver atteint 1 627 €/ha, les travaux par tiers n’étant pas compris dans les charges opérationnelles affectées. Les charges opérationnelles affectées n’ayant pas enregistré de changements importants, l’évolution de la marge brute suit assez fidèlement celle des produits. Elle a ainsi enregistré une baisse entre 2012 et 2016 où elle est passée par un minimum de 540 €/ha avant de remonter à plus de 1 400 €/ha en 2020, résultat identique à l’année 2012. L’année 2021 a encore fait mieux comme le montre l’excellent résultat. La moyenne de la marge brute du produit principal de cette culture pour les dix dernières années est de l’ordre de 1 090 €/ha.
La marge brute totale de la culture de froment incluant le produit secondaire issu de la paille et les travaux par tiers dans les charges s’établit à 1 737 €/ha. C’est la meilleure marge brute des dix dernières années.
- Si l’écart de marge brute atteint 330 €/ha entre les zones agricoles, il dépasse 920 €/ha entre les producteurs les plus et les moins performants au sein de la zone « grandes cultures »
Les écarts de rendement et de prix se traduisent sur le niveau de marge brute obtenu. Ainsi, en 2021, la culture de froment d’hiver en zone « grandes cultures » atteint une marge brute du produit principal, travaux par tiers non compris, de 1 711 €/ha alors qu’elle est de 1 418 €/ha pour le Condroz et de 1 381 €/ha pour la zone herbagère.
Si on analyse les résultats des exploitations de la zone « grandes cultures », les producteurs les plus performants obtiennent une marge brute du produit principal de 2 160 €/ha alors que les moins performants plafonnent à 1 237 €/ha. L’écart entre ces extrêmes est donc supérieur à la différence entre les moyennes des super-régions. Le groupe le moins performant obtient des résultats nettement inférieurs à la moyenne des agriculteurs de la zone herbagère.