Cette fiche analyse la culture de froment d’hiver selon une approche territoriale et une approche technico-économique. La première décrit la répartition des superficies de cette culture en région wallonne selon la super-région et selon l'orientation technico-économique [OTE]. La seconde analyse les facteurs influençant la marge brute de cette culture et ce, pour l’ensemble des producteurs, en agriculture conventionnelle, du réseau comptable de la Direction de l’analyse économique agricole [DAEA] ayant au moins 1 ha de culture de froment d'hiver. Elle présente les différents éléments constituant la marge brute : les produits et les charges opérationnelles affectées à cette culture, sur l’ensemble du territoire, au sein des régions agricoles et de la zone orientée « grandes cultures ».
Le froment d'hiver est la principale céréale cultivée en Wallonie et est présent dans la moitié des exploitations wallonnes, majoritairement celles spécialisées en grandes cultures. L’année 2023 se caractérise par un rendement et un prix comparables à la moyenne des dix années antérieures. Cependant, les charges opérationnelles affectées sont restées élevées et de ce fait pénalisent la marge brute de cette culture. Enfin, au sein d’une même région et d’une même année, l’écart de marge brute entre les cultivateurs les plus et les moins performants atteint les 60 % de la marge brute moyenne.
Le froment d'hiver reste la principale culture wallonne en 2023, principalement emblavée au sein d’exploitations spécialisées en grandes cultures
Avec plus de 131 000 ha en 2023, le froment d’hiver reste la principale culture agricole en Wallonie. Cette céréale est présente dans un peu plus de la moitié des exploitations wallonnes, sur une superficie moyenne de 20,6 ha.
- 70 % de la superficie de froment d’hiver sont situés dans la zone « grandes cultures »
Pour analyser l’influence des régions agricoles sur les cultures commerçables, on distingue trois « super-régions » que l’on suppose suffisamment homogènes sur le plan des techniques culturales et des résultats. Premièrement, la zone « grandes cultures » regroupant les régions limoneuse et sablo-limoneuse ainsi que la Campine hennuyère. C’est dans ces régions que les cultures commerçables sont les plus fréquentes et que l’on retrouve le plus d’exploitations spécialisées en grandes cultures. Deuxièmement, la zone « herbagère » composée des régions agricoles : région herbagère, Fagnes, Famenne, région jurassique, Ardenne et Haute Ardenne. Ces régions sont plus spécialisées en élevage, surtout bovin, et le pourcentage de prairies y est important. Finalement, la zone « Condroz » qui est une région agricole intermédiaire. Cette subdivision de la Wallonie est réalisée pour obtenir un effectif suffisant pour comparer les zones entre elles et pour réaliser des analyses de classe de performance au sein d’une zone donnée (essentiellement la zone « grandes cultures »).
La culture de froment d'hiver se retrouve principalement dans la zone « grandes cultures ». Cette dernière regroupe presque 70 % des terres qui lui sont dédiées et des cultivateurs, avec une superficie moyenne de 21,1 ha par exploitation, professionnelle ou non. En 2023, plus de 80 % des exploitants de cette zone sèment du froment d'hiver.
Avec 23 % de la superficie dédiée à la culture de froment d’hiver, le Condroz arrive en seconde position et se distingue par une plus grande superficie moyenne, s’élevant à presque 25 ha. Cette région regroupe pratiquement un cinquième de ces cultivateurs.
La zone herbagère comprend peu d’hectares emblavés en froment d'hiver. A peine plus de 7 % de la superficie de cette culture se retrouve dans cette zone et moins de 16 % des exploitants de cette zone en implante.
- Les exploitations professionnelles spécialisées en grandes cultures et cultivant du froment d’hiver, ont une SAU moyenne dédiée à cette culture de 26 ha
L’analyse des facteurs sur base des orientations technico-économiques [OTE] n’est effectuée que pour les exploitations dites professionnelles, c'est-à-dire dont la production brute standard totale est supérieure à 25 000 €. Ces dernières couvrent 98 % de la superficie agricole utile [SAU] wallonne.
En 2023, 5 973 exploitations professionnelles cultivent 129 848 ha de froment d’hiver, soit 21,7 ha en moyenne, une superficie légèrement supérieure à la moyenne wallonne. 63 % de la superficie emblavée en froment d'hiver (81 995 ha) se retrouvent au sein d'exploitations professionnelles spécialisées en grandes cultures. Ces exploitations représentent plus de la moitié des producteurs de froment d'hiver et en moyenne, ils y consacrent 26,1 ha. A contrario, les exploitations spécialisées en bovins gèrent 12,1 % de la superficie totale dédiée à cette culture, pour une SAU moyenne deux fois moindre.
En 2023, le rendement moyen du froment d’hiver reste sous les 8 900 kg/ha et le prix sous les 195 €/t
En 2023, le rendement de la culture de froment d’hiver s’établit à 8 890 kg/ha proche de la moyenne des dix années précédentes qui est de l’ordre de 8 950 kg/ha. Le printemps humide suivi d’une période de sécheresse avant un été chaud et humide n’a pas été optimal pour obtenir les rendements les plus élevés et a compliqué la récolte.
Après 3 années de hausse successive, le prix de vente du grain de froment descend à 195 €/tonne soit la valeur observée en 2020. C’est plus de 80 €/tonne en moins qu’en 2022, bien que cela soit supérieur au prix moyen des dix années précédentes qui est de 187 €/tonne.
- Les agriculteurs les plus performants de la zone « grandes cultures » récoltent 2 000 kg/ha en plus que les moins performants
Le rendement observé dans la zone « grandes cultures » est de 9 080 kg/ha de froment d’hiver soit à un niveau supérieur aux 8 500 kg/ha relevés dans le Condroz et aux 8 160 kg/ha observés dans la zone « herbagère ». Pour la seconde année consécutive, les agriculteurs de la zone « grandes cultures » obtiennent en 2023 un prix de vente légèrement inférieur. Cela peut être lié à l’évolution du prix qui s’est maintenu à un niveau moyen et a commencé à baisser en février 2024. Les exploitants de la zone « grandes cultures », pour qui il s’agit d’une importante source de revenu, préfèrent souvent attendre un peu avant de vendre leurs céréales en espérant obtenir le prix le plus élevé.
En 2023, en comparant entre eux, les producteurs de froment d’hiver de la zone « grandes cultures », au niveau de leurs performances dans l’obtention de la marge brute, on observe que les producteurs les plus performants (quartile supérieur) atteignent un rendement de près de 9 820 kg/ha et vendent leurs grains à un prix de 203 €/t. A l’opposé, les moins performants plafonnent avec un rendement de 7 800 kg/ha qu’ils valorisent à 187 €/t. Le différentiel de rendement entre les groupes extrêmes est de l’ordre de 2 000 kg/ha. L’écart de prix de vente de 16 €/t est assez faible et témoigne du peu d’évolution du prix durant la période de vente.
Rendement de la culture de froment d'hiver et prix de vente de son grain de la zone "grandes cultures" selon le niveau de performance des exploitations en 2023
Rendement de la culture de froment d'hiver et prix de vente de son grain de la zone "grandes cultures" selon le niveau de performance des exploitations en 2023
En 2023, avec 1 726 €/ha, le produit principal pour le froment d’hiver enregistre une chute de 860 €/ha par rapport à 2022
En 2023, le prix du grain de froment et son rendement, tous deux proches de la moyenne des dix années précédentes conduisent à un produit principal, issu de sa valorisation, de 1 726 €/ha, assez logiquement proche de la moyenne. Depuis 2012, ce produit principal n’a cessé de diminuer pour atteindre pratiquement 1 000 €/ha en 2016, avant de passer par un maximum de 2 589 €/ha en 2022 et de perdre plus de 860 €/ha pour arriver à la valeur de 2023. A ce produit principal s’ajoute un éventuel produit secondaire provenant de la valorisation de la paille vendue ou intra-consommée qui représente 284 €/ha pour 2023.
- Le différentiel de produit principal, entre la zone « grandes cultures » et les autres zones, est relativement faible
En 2023, en zone « grandes cultures », le produit principal de la culture du froment atteint 1 751 €/ha, soit à peine 80 à 140 €/ha de plus que dans le Condroz ou la zone « herbagère ».
En comparant les performances des producteurs de froment d’hiver pour la zone « grandes cultures », on relève un différentiel de produit principal de 535 €/ha entre les groupes extrêmes.
Produits principal et secondaire de la culture de froment d'hiver de la zone "grandes cultures" selon le niveau de performance des exploitations en 2023
Produits principal et secondaire de la culture de froment d'hiver de la zone "grandes cultures" selon le niveau de performance des exploitations en 2023
En 2023, les charges opérationnelles affectées pour le froment restent à un niveau élevé
En 2023, les charges opérationnelles affectées, hors travaux par tiers, pour la culture de froment s’élèvent à 714 €/ha, alors que la moyenne des dix années précédentes est de 495 €/ha. Les achats d’engrais restent, comme en 2022, le poste le plus important et représentent 49 % de ces charges. Les pesticides représentent 35 %, les semences un peu moins de 15 % et le solde composé des autres charges directes à peine 1 %.
Ces charges opérationnelles affectées ont connu une forte hausse après 2010 et sont passées par un maximum de plus de 500 €/ha en 2013 et 2014, avant de redescendre à un niveau de l’ordre de 450 €/ha jusqu’en 2021. La hausse de 2022 est essentiellement due à la hausse des charges en fertilisation. Les prix des engrais étaient à un niveau relativement bas de 2017 à 2021, ils ont enregistré une hausse très marquée fin de l’année 2021, parallèlement à la hausse des prix de l’énergie. Malgré une baisse du prix des engrais en 2023 permettant une diminution de la charge en engrais, celle-ci reste limitée car une partie des achats a été faite en 2022. En revanche, la saison humide a exigé quelques traitements phytosanitaires supplémentaires.
La fertilisation azotée pour le froment oscille entre 180 à 190 unités/ha au cours des dix dernières années. Les apports de phosphore et de potassium sont de l’ordre de 4 à 6 unités/ha pour chaque élément nutritif. Toutefois, vu le prix des engrais en 2022 et 2023, les exploitants ont limité leur apport d’azote à moins de 180 unités/ha, alors que le total pour le phosphore et le potassium ne dépasse pas 5 à 6 unités/ha.
A titre informatif, le montant consacré aux travaux par tiers est de 199 €/ha, soit à un niveau supérieur à la moyenne des dix années précédentes de 166 €/ha qui s’explique sans doute par une adaptation des tarifs des entrepreneurs vu le prix de l’énergie.
- Les écarts de charges opérationnelles affectées sont peu importants que ce soit entre les groupes de performance ou entre les régions agricoles
En comparant les trois grandes zones agricoles considérées, il n’y a pas de grandes différences au niveau des charges opérationnelles affectées, hors travaux par tiers, qui varient de 665 à 747 €/ha. Les charges sont un peu plus basses dans la zone « herbagère », suite à une fertilisation un peu plus faible.
De même, les groupes de performance au sein de la zone « grandes cultures » montrent des écarts limités entre leurs montants de charges opérationnelles affectées qui sont compris entre 661 et 735 €/ha. Les écarts observés sont uniquement liés aux dépenses en fertilisation. Les exploitants les plus performants dépensent environ 50 €/ha en moins pour ce poste que le groupe le moins performant.
Charges opérationnelles affectées à la culture de froment d'hiver dans la zone "grandes cultures" selon le niveau de performance des exploitations en 2023
Charges opérationnelles affectées à la culture de froment d'hiver dans la zone "grandes cultures" selon le niveau de performance des exploitations en 2023
L’année 2023 se marque par une réduction de plus 800 €/ha de la marge brute du produit principal du froment par rapport à l’année précédente
En 2023, la marge brute du produit principal de la culture de froment d’hiver atteint 1 012 €/ha, les travaux par tiers n’étant pas compris dans les charges opérationnelles affectées. Celle-ci, peu satisfaisante, résulte d’un niveau de produits moyens mais avec des charges opérationnelles affectées qui sont restées nettement supérieures à la moyenne antérieure. La moyenne de la marge brute du produit principal de cette culture pour les dix années précédentes est de l’ordre de 1 176 €/ha. Cette marge brute a enregistré une baisse entre 2012 et 2016 où elle est passée par un minimum de 540 €/ha avant de remonter et de dépasser les 1 800 €/ha en 2022.
La marge brute totale de la culture de froment incluant le produit secondaire issu de la paille et les travaux par tiers dans les charges s’établit à 1 096 €/ha.
- L’écart de marge brute atteint à peine 100 €/ha entre les zones agricoles mais dépasse 600 €/ha entre les producteurs les plus et les moins performants au sein de la zone « grandes cultures »
En 2023, la culture de froment d’hiver en zone « grandes cultures » atteint une marge brute du produit principal, travaux par tiers non compris, de 1 044 €/ha alors qu’elle est de 926 €/ha pour le Condroz et de 950 €/ha pour la zone « herbagère ».
Concernant les résultats des exploitations de la zone « grandes cultures », les producteurs les plus performants obtiennent une marge brute du produit principal de 1 336 €/ha alors que les moins performants plafonnent à 727 €/ha. L’écart entre ces extrêmes est donc supérieur à la différence entre les moyennes des super-régions. Le groupe le moins performant obtient des résultats nettement inférieurs à la moyenne des agriculteurs de la zone « herbagère » ou du Condroz.