Cette fiche présente l’évolution des prix à la production (prix reçus) et des prix des moyens de production (prix payés) pour le secteur agricole belge. Les indices des prix agricoles (IPA) servent avant tout à l'analyse de l'évolution des prix. Ils sont établis pour la Belgique et sont basés sur l’année 2015.

Contrairement à l’année 2020, marquée par la pandémie de la Covid-19, les prix en 2021 repartent globalement à la hausse. Les indices des prix à la production et des moyens de production sont donc en hausse par rapport à 2020. L’année 2021 est également marquée par une hausse historique de 50 % de l’indice des prix des engrais, qui suit l’augmentation du prix de l’énergie.

L’indice des prix reçus est en hausse en 2021

L’indice global des prix reçus en 2021 est en hausse comparativement à l’année précédente (124,14 contre 112,47 en 2020). Cette augmentation masque des évolutions divergentes selon les types de productions. Ainsi, les productions agricoles végétales, après deux années consécutives en baisse, voient leur indice augmenter à un niveau supérieur à 2018.  Les produits animaux et issus de l’horticulture progressent également mais dans une moindre mesure par rapport à 2020.

Variation des indices des prix agricoles et horticoles en Belgique

 

- L’indice des prix des produits végétaux issus de l’agriculture est notamment marqué par les prix très fluctuants des pommes de terre

Les pommes de terre peuvent être commercialisées sur deux types de marché : le marché libre, régi par la loi de l’offre et de la demande, et le marché à terme, qui repose sur des contrats négociés entre producteurs et transformateurs. Seul le prix sur le marché libre est abordé ici. Il existe un lien entre l’évolution des prix à la production et l’évolution de la production des pommes de terre de conservation. Lorsque l’on enregistre des prix hauts une année, les producteurs escomptant un bon revenu de cette culture tâchent d’accroître la superficie qu’ils vont mettre en culture l’année qui suit. Si les rendements sont bons, la production sera élevée et le jeu du marché libre aura pour effet des prix à la baisse. En revanche si les rendements sont faibles, la production ne sera pas plus élevée voire même baissera ce qui maintiendra des prix élevés. Cette relation implique de fortes variations annuelles du prix des pommes de terre. Le marché libre ne concerne que les pommes de terre de conservation destinées à l’industrie. Pour le marché du frais ou pour la filière chips, le marché est très majoritairement contractuel. Si généralement, pour cette culture, on observe une corrélation inverse entre le rendement et le prix, cette année 2021 ne confirme pas la règle. Les prix ont été soutenus durant la saison, grâce notamment à l’exportation vers l’Europe du Sud et de l’Est ainsi que vers l’Afrique.

Le prix des betteraves sucrières, qui a une tendance plutôt baissière depuis de nombreuses années, est en légère hausse en 2021. Cependant depuis 2016, l’indice est inférieur à la base 100. Au cours des années qui ont suivi la suppression des quotas en 2017, le marché mondial a été confronté à un important excédent de sucre, entraînant une forte baisse des prix ce qui a influencé les prix à l’échelon européen. En effet, le prix belge de la betterave et le prix européen de sucre blanc (c'est-à-dire les produits en vrac des raffineries de sucre) sont fortement corrélés. Il existe néanmoins un retard en raison du temps écoulé entre la récolte des betteraves et la vente du sucre produit. En 2021, le prix européen est à la hausse. En effet, la demande en sucre est supérieure à l’offre, en partie à la suite de la diminution de production de sucre au Brésil à cause de la sécheresse.

Le prix des céréales dépend principalement de celui du froment car il représente 61 % de la superficie céréalière belge en 2021. Depuis 2019, l’indice des céréales progresse, permettant à ce dernier d’atteindre, en 2021, son niveau le plus haut depuis 2001. De tels prix peuvent s’expliquer par une production mondiale de céréales inférieure aux besoins de consommation, faisant flamber les prix.

Variation de quelques indices des prix de productions végétales en Belgique

 

- L’indice des prix des produits animaux est en hausse excepté pour les porcs en 2021

Depuis 2016, l’indice de la viande bovine est à la hausse pour atteindre 108,06 en 2021. L’augmentation des prix n’est pas seulement due à la crise de la Covid-19 qui a augmenté la consommation domestique, mais également au nombre annuel d’éleveurs de bovins de boucherie en déclin, à la perturbation du commerce international due à la pandémie (les importations ralentissent) et à une meilleure organisation des producteurs dans les organisations de producteurs.

En 2021, l’augmentation du prix du lait, avec une moyenne de 38.5€/100 l est liée à l’augmentation des cours mondiaux du beurre et de la poudre de lait notamment parce que la demande mondiale en produits laitiers a excédé l’offre.

Le secteur porcin belge est plongé dans une crise profonde. En 2021, le prix du porc est bas et les causes sont diverses.

  • Au niveau européen :

Le marché porcin étant un marché international, le marché européen détermine le marché belge. Or, les prix dans le marché européen sont très bas. Le secteur belge étant autosuffisant à 249%, les prix bas se répercutent plus durement au niveau belge.

Par ailleurs, la demande est faible : les exportations au sein de l’Union européenne [UE] sont en baisse et les exportations en dehors de celle-ci sont difficiles. En raison de la peste porcine africaine [PPA], l'Allemagne perd l'accès à la plupart des pays tiers (principalement la Chine). L'Allemagne représente 22% du total des exportations européennes de porc. Ces porcs se retrouvent désormais sur le marché européen, ce qui fait baisser les prix. La Belgique, maintenant redevenue indemne de PPA, tente de rétablir ses contrats commerciaux.

  • Au niveau belge :

Le secteur porcin se caractérise par des cycles de meilleures et de mauvaises années. Par exemple, 2019 est une très bonne année sur les marchés européens, mais la Belgique n’est pas en mesure d’en profiter pleinement à cause de la présence de la PPA en Gaume. En conséquence, les élevages porcins belges commencent cette crise porcine sans avoir pu constituer des réserves financières, contrairement aux autres États membres de l’UE. En 2021, alors que la Belgique est exempte de PPA, le marché belge est au plus bas, et même le plus bas de l’UE.

Variation des indices des prix de productions animales en Belgique

 

- L’indice des prix des produits horticoles continue sa hausse en 2021

Le cours du marché des poires d'une année est fortement influencé par la production de l'année précédente. La récolte ayant lieu dans les derniers mois de l'année, les marchés évoluent en fonction des quantités disponibles, encore lors des 2 premiers trimestres de l'année suivante. Au cours des premiers mois de 2021, la culture de la poire, qui est plus importante que la culture de la pomme, est dans une situation de marché défavorable. Les stocks sont au point le plus élevé de ces 5 dernières années, soit 65% de plus qu’en 2020 au cours de la même période. Dans le même temps, les prix sont faibles : le prix moyen des poires est inférieur à la moyenne quinquennale de janvier à juin.

La saison des poires 2021-2022 est très différente : comme les conditions météorologiques extrêmes du printemps et de l’été 2021 ont eu un impact important sur la production de poires dans d’autres États membres de l’UE, il y a une forte demande à l’automne 2021 et de bons prix pour les poires belges. Dès la fin du mois d’août, les prix de la poire atteignent un niveau record, comparable aux prix élevés de 2012.

A l’inverse, au niveau des pommes, au début de 2021, les prix des pommes sont bons, bien que pour un volume inférieur à celui de la saison précédente. Dans l’ensemble de l’Europe, la demande et la production sont élevées. Avec le début de la nouvelle saison des fruits durs, cette situation change : la récolte de pommes est bonne dans toute l’Europe, rendant les ventes plus difficiles et les prix bas.  

Pour les légumes en plein air, les prix sont raisonnablement stables au premier semestre de 2021, par rapport à 2020. L’horticulture sous serre est difficile en 2021 : pour les tomates, par exemple, les prix « hiver » sont observés en été. Cela s’explique par la demande croissante de l’industrie de la restauration, mais aussi principalement par la baisse de la production résultant du mauvais temps estival et de la pression importante de la maladie due au virus du fruit. Ce virus hautement contagieux est une préoccupation majeure pour les producteurs de tomates et de poivrons. Le prix des autres cultures en serre les plus importantes est relativement stable : le prix du concombre et des poivrons fluctue autour de la moyenne quinquennale tout au long de 2021. Bien que la laitue connait une période très difficile en 2020, principalement en raison de la fermeture de l’industrie de la restauration à la suite des mesures liées à la Covid-19, les prix de la laitue se redressent en 2021.

Variation des indices des prix de productions horticoles en Belgique

 

L’indice des prix des moyens de production augmente en 2021

Les moyens de production reprennent l’ensemble des éléments qui participent à la production tels que les consommations intermédiaires, les investissements, la rémunération de la main-d’œuvre salariée, la rémunération des terres agricoles (fermages) ainsi que les intérêts.

A l’exception des intérêts, en Belgique, les prix des moyens de production progressent depuis des années. Ils ont atteint le niveau le plus haut depuis 2001.

Variation des indices des prix des moyens de production en Belgique

  

- L’indice de prix des consommations intermédiaires repart à la hausse en 2021 permettant aux indices d’atteindre des niveaux historiquement hauts.

Les consommations intermédiaires de l’agriculture sont les biens et services effectivement consommés sur une année civile pour réaliser la production, tels que les matières premières, l’énergie, etc.

En 2021, le prix des consommations intermédiaires augmente de 15 % par rapport à 2020. L’énergie a repris sa valeur d’avant la crise sanitaire de la Covid-19.  A l’exception de l’année 2020, les indices ont tendance à progresser et 2021 est l’année où la plus forte hausse est enregistrée depuis 2001. Cette augmentation est particulièrement impressionnante pour les engrais, suite à la flambée du gaz (non repris dans l’indice des prix de l’énergie).

Les prix à la consommation du mazout de chauffage et des carburants sont déterminés principalement par l’évolution du cours du pétrole sur les marchés internationaux. Les prix de l’électricité et du gaz sont, pour leur part, découplés des cours du pétrole, bien qu’ils en subissent indirectement les conséquences (source : Statbel[1]).

En 2021, le cours du Brent, qui sert de référence pour le pétrole en Europe, est de 71 $ par baril contre 42 $ en 2020, soit une hausse d’environ 70 %. En effet, la levée des restrictions de déplacement post-pandémie et la forte reprise économique mondiale font augmenter la demande de pétrole. 

Variation de quelques indices des prix des consommations intermédiaires en Belgique

 

- Les autres moyens de production continuent à augmenter, à l’exception de l’indice de prix des intérêts en baisse depuis plus de 10 ans

Les investissements comprennent le matériel (tracteurs) et les ouvrages (bâtiments) d'exploitation. Le coût de ces investissements dépend du prix de l’énergie, de l’utilisation de nouveau type de matériaux, de plus en plus performants et de plus en plus complexes, nécessitant souvent plus d’énergie à leur fabrication ce qui entraîne un coût en augmentation.

L’indice des salaires illustre l’évolution du coût horaire moyen de la main-d’œuvre. Depuis 2015, une augmentation d’environ 2% par an est observée. Pourtant, 2021 fait exception avec une augmentation de seulement 1%. L’effet post-pandémie a participé à cette stagnation.

Alors que les indices détaillés dans cette fiche sont d’application sur l’ensemble du territoire belge, les fermages se distinguent par une augmentation différente selon les régions, le système de calcul de coefficient de fermage étant régionalisé. En 10 ans, le prix des fermages belges de terres labourées a augmenté de 33% et celui des prairies de 21%. Cependant, une augmentation plus nette est observée en Flandre qu’en Région wallonne.

Les intérêts, quant à eux, voient leur indice diminuer depuis plusieurs années. Cette diminution est attribuable à de nombreux éléments dont, par exemple, une faible croissance de l’économie mondiale et de l’inflation, mais notons qu’il s’agit d’une tendance mondiale et non propre à la Wallonie.


[1] Direction générale Statistique, Service public fédéral Économie (Statbel) – Indice des prix agricoles