Cette fiche aborde la rentabilité de l’exploitation spécialisée en grandes cultures. Faisant suite à la présentation des produits et des charges de cette exploitation, sont analysées, en procédant par étape, les évolutions de la marge brute, de l’excédent brut et des revenus. Ces analyses utilisent les données provenant du réseau comptable de la Direction de l’Analyse économique agricole [DAEA].
Au départ d’une marge brute de l’ordre de 1 928 €/ha de superficie agricole utilisée [SAU], l’exploitation spécialisée en grandes cultures obtient un excédent brut proche de 1 610 €/ha de SAU et un revenu agricole de 1 264 €/ha de SAU. Ces valeurs poursuivent la hausse observée en 2020. Les résultats obtenus en 2022 dépassent les valeurs des bonnes années 2012 et 2013.
En 2022, la marge brute de l’exploitation spécialisée en grandes cultures poursuit la hausse démarrée en 2017
La marge brute traduit l’efficacité avec laquelle l’exploitation génère des produits au moyen de ses charges opérationnelles affectées. En 2022, elle est de 1 928 €/ha de SAU (2 153 €/ha avec les travaux par tiers non compris dans les charges).
La marge brute pour les exploitations spécialisées en grandes cultures enregistre une hausse marquée, de près de 400 €/ha de SAU par rapport à l’année précédente qui était pourtant une bonne année. Elle est nettement supérieure à la moyenne des dix années précédentes, qui s’établit aux alentours de 1 250 €/ha de SAU. Elle résulte d’une augmentation des produits nettement plus importante que celle des charges opérationnelles affectées. L’année 2016 reste l’année la plus mauvaise de la décennie. Les produits, ayant chuté de manière plus importante que les charges, amenant ainsi la marge brute à 952 €/ha de SAU, ce qui constitue le minimum de cette période. A l’inverse, en 2012, la marge brute avait atteint 1 414 €/ha de SAU, grâce à des produits élevés.
L’évolution de l’excédent brut d’exploitation [EBE] est très similaire à celle de la marge brute
L’excédent brut de l’exploitation spécialisée en grandes cultures atteint en 2022 une valeur de 1 610 €/ha de SAU. L’excédent brut d’exploitation est le résultat de la soustraction des charges réelles de l’exploitation (hors amortissements et intérêts) au total des produits des activités (produits exceptionnels non compris) et des aides récurrentes. Il doit permettre de rémunérer la main d’œuvre familiale et de financer les investissements.
A la différence de la marge brute, l’excédent brut d’exploitation prend en considération les aides ainsi que les charges fixes réelles. Etant donné que les éléments cités évoluent somme toute peu dans le temps, on observe un parallélisme dans l’évolution de ces deux indicateurs de rentabilité.
La moyenne des dix années précédentes de l’excédent brut de l’exploitation spécialisée en grandes cultures atteint une valeur de 1 076 €/ha de SAU.
Calcul de l'excédent brut d'exploitation en 2022
MB = Marge brute
EBE = Excédent brut d’exploitation
MB & Prod. = Marge brute et autres produits
Charg. str. = Charges réelles de structure
MB = Marge brute
EBE = Excédent brut d’exploitation
MB & Prod. = Marge brute et autres produits
Charg. str. = Charges réelles de structure
Pour la troisième année successive, les revenus exprimés par unité de surface augmentent sensiblement
Le revenu du travail et capital familial, ou revenu agricole, est la différence entre d’une part, la valorisation de l’ensemble des productions de l’exploitation et des autres produits (hormis les produits de nature exceptionnelle : ventes d’avoirs, …) et, d’autre part, l’ensemble des charges réelles (sauf les charges exceptionnelles). Ce montant sert à rémunérer le travail des non-salariés, c’est-à-dire les exploitants eux-mêmes, et le capital investi dans l’exploitation.
Quant au revenu du travail, il est le résultat économique de l’exploitation, après avoir couvert l’ensemble des charges réelles (hors main d’œuvre) et les charges calculées sur les capitaux en propriété engagés par l’exploitant dans l’entreprise (fermages nets sur terres en propriété et intérêts sur capital d’exploitation propre). Dans ce revenu, on suppose que le mode de rémunération des facteurs de production (terre, capital et travail) soit le même dans toutes les exploitations. Aucune distinction n'est faite entre les fonds propres et le capital emprunté, ni entre le fait d’être ou non propriétaire et ni entre le travail non salarié et le travail salarié. Le revenu agricole est plus pertinent lorsque l’on parle de la gestion individuelle de l’exploitation tandis que le revenu du travail permet de placer les exploitations dans un référentiel commun de comparaison. Le revenu du travail facilite la comparaison entre exploitations (locataires ou propriétaires) et au fil du temps (pas d’impact des intérêts fluctuants).
En 2022, le revenu agricole monte à une valeur de 1 264 €/ha de SAU, tandis que le revenu du travail s’établit à 1 145 €/ha de SAU. Tant pour le revenu agricole que pour le revenu du travail, l’amélioration observée en 2020 et 2021 se poursuit en 2022 et les résultats dépassent très largement les niveaux atteints en 2012 et 2013.
Les revenus exprimés par unité de travail montrent une tendance similaire à ceux exprimés par unité de surface
Si l’on se penche sur la gestion individuelle de l’exploitation, plus particulièrement sur la main d’œuvre familiale, le revenu agricole est alors un indicateur pertinent. Sa valeur doit, en principe permettre de rémunérer une unité de main d’œuvre familiale [UTF] et le capital qu’elle apporte dans l’exploitation.
Il atteint en 2022, pour l’exploitation spécialisée en grandes cultures, une valeur de 82 214 €/UTF. C’est nettement plus que la moyenne des dix dernières années qui est de 45 241 €/UTF. C’est également nettement supérieur aux 63 955 €/UTF obtenus en moyenne par l’exploitation wallonne. Au cours des dix dernières années, le revenu agricole par unité de travail familial a toujours été supérieur à celui obtenu en moyenne par l’exploitation wallonne.
D’autre part, il est également intéressant de déterminer le revenu du travail par unité de travail total [UT]. Cette valeur indique la capacité de l’exploitation à rémunérer la main d’œuvre salariée et non salariée et intègre l’évolution de la performance du travail de la main d’œuvre. Ce revenu correspond à une rémunération brute, les charges sociales doivent encore y être prélevées. Il permet de comparer et de suivre l’évolution de la capacité des exploitations à rémunérer la main d’œuvre en les plaçant dans des situations comparables (propriétaire ou non et taux d’intérêts fixe).
En 2022, ce revenu du travail atteint, en moyenne, 67 721 €/UT pour l’exploitation spécialisée en grandes cultures. Au cours des dix années précédentes, il a varié entre 16 200 €/UT en 2016 et plus de 50 000 €/UT en 2012 et 2021. Tout comme pour le revenu agricole, le revenu du travail par unité de travail de l’exploitation spécialisée en grandes cultures est supérieur à celui de l’exploitation wallonne.
- La grande disparité des revenus entre exploitation est bien supérieure aux variations interannuelles
Derrière ces valeurs moyennes se cache une grande disparité entre exploitation. Plus d’un tiers des exploitations ont un revenu du travail par unité de travail total supérieur à 100 000 €/UT, tandis que 3 % d’exploitations obtiennent un revenu négatif alors que l’année 2022 est une excellente année. Pour ces dernières, cela traduit que l’exploitation n’est pas en mesure de fournir une rémunération au travail et au capital investi du même niveau que celui retenu pour ces charges calculées (travail familial et intérêt sur le capital investi). La variabilité est liée à une série d’éléments dont certains sont parfois indépendants de la bonne ou mauvaise gestion de l’exploitant (localisation, santé, âge, …).